Nouvelle-Calédonie: «retour progressif à la vie normale» avec une réouverture de l'aéroport
- Ludeny Phedjyna Eugene
- 17 juin 2024
- 4 min de lecture

Réouverture en journée de l'aéroport international de Nouméa et des établissements scolaires, permission de sortie jusqu'à 20 heures… Lundi 17 juin, la Nouvelle-Calédonie devrait amorcer un « retour progressif à la vie normale » après un mois de violents troubles qui ont fait neuf morts.
Ce dimanche 16 juin, le Haut-commissariat de la République, représentant de l'État français sur l'archipel de 270.000 habitants, « a décidé la réouverture en journée de l'aéroport international de Nouméa-La Tontouta » et « de repousser à 20 h le début du couvre-feu à compter de lundi », contre 18 h jusque-là, selon un communiqué.
La décision de rouvrir l’aéroport a été prise en raison de « la circulation en journée (...) rendue possible sur la RT1 », une double voie express reliant le centre de Nouméa à l'aéroport international de La Tontouta, rendue longtemps inaccessible à cause des nombreux barrages installés par les manifestants indépendantistes.
« La semaine dernière, l'aéroport était gardé par les forces de l'ordre avec des points de filtrage, seules les personnes autorisées pouvaient y accéder en empruntant des navettes dédiées obligatoires », a expliqué à l'AFP Charles Roger, directeur général des Chambres de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie.
« À partir de lundi, les passagers pourront venir par leurs propres moyens à l'aéroport qui ne sera plus gardé par les forces de l'ordre. Toutes les compagnies pourront desservir l'aéroport, il n'y aura pas de restriction, y compris concernant le kérosène », a poursuivi Charles Roger, précisant que l'idée était de faire arriver les vols en fin de matinée ou début d'après-midi.
Le Haut-commissariat a également repoussé de deux heures le début du couvre-feu - qui court jusqu'à 6 heures le lendemain – « au regard de l'amélioration de la situation et afin de faciliter le retour progressif à la vie normale ». Il débutera à 20h (au lieu de 18H). Le couvre-feu a été instauré le 14 mai, puis l'état d'urgence le lendemain, ce dernier ayant été levé le 28 mai.
En revanche, « l'interdiction de la vente d'alcool (exception pour les cavistes), de vente et de transport d'armes sont prolongés ». Par ailleurs, lundi, les élèves de primaire et secondaire reprendront progressivement le chemin de l'école, selon les zones et les établissements. Les enfants de primaire en province Sud seront les premiers à retourner en classe, suivis des collégiens dans le courant de la semaine prochaine, puis des lycéens à partir du 24 juin.
Une situation paradoxale
Cet assouplissement « donne l'impression que la situation s'améliore, ce qui est plutôt une bonne chose », témoigne Thibaut Bizien, un habitant joint par Sylvie Koffi, du service France de RFI, d'autant que la population est « fatiguée par la situation ». Mais il reste des problèmes, « c'est à dire que la crise s'enlise. Déjà, on voit l'étendue des dégâts, on voit que les entreprises sont toujours dans le même état de dégradation ; les travaux pour enlever les débris des exactions commises n'ont même pas commencé... dans notre quartier, on maintient les barrages. Et puis il y a beaucoup de choses qui sont perturbées : axes routiers (bloqués), problèmes d'accès aux soins... on reste encore dans un conflit qui s' enlise.
À ça s'ajoutent les élections législatives qui se déroulent dans ce contexte-là, ce qui est assez assez inédit. Et on se dit, c'est c'est un peu surréaliste parce qu'on a des élus qui n'ont pas apporté de solutions à la crise et qui vont partir en campagne pour pour qu'on vote pour les législatives, alors même qu'on est dans une situation qui ne nous permet pas de pouvoir vivre normalement ! »
Car, dans ce contexte tendu, la Nouvelle-Calédonie doit également s'organiser pour les élections législatives des 30 juin et 7 juillet.
1,5 milliard d'euros de dégâts
La Nouvelle-Calédonie est en proie depuis le 13 mai à de violents troubles provoqués par l'adoption par l'Assemblée nationale d'un projet de loi de réforme constitutionnelle permettant un dégel du corps électoral, qui, selon ses opposants, marginaliserait davantage le peuple autochtone kanak. Mercredi dernier, le président Emmanuel Macron a suspendu le projet de loi mais les indépendantistes entendent continuer à lutter jusqu'à l'abandon de ce projet, qui permettrait s'il est adopté aux personnes présentes sur l'archipel depuis au moins dix ans de voter aux élections provinciales, cruciales pour la vie de l'archipel.
Le collectif de la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT), au coeur de la révolte des indépendantistes, a répété rester « mobilisé tant que le projet de loi constitutionnel n'est pas définitivement enterré et ce, jusqu'à l'indépendance », lors de leur assemblée générale tenue jeudi et vendredi à Bourail, dans le nord de l'archipel.
Selon le dernier bilan publié dimanche par le Haut-commissariat, les émeutes ont fait neuf morts, dont deux gendarmes, et « aucun nouveau décès n'est à déplorer », a souligné le représentant de l'état, précisant que 248 policiers et gendarmes avaient été blessés et 1 187 personnes interpellées. Au total, quelque 3 500 effectifs de forces de sécurité sont déployés sur ce territoire ultra-marin du Pacifique Sud. De nombreux bâtiments ont été brûlés, des magasins pillés.







Commentaires