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Le méga-port de Chancay au Pérou,un pont entre la Chine et le continent sud-américain

  • Photo du rédacteur: Ludeny Phedjyna Eugene
    Ludeny Phedjyna Eugene
  • 1 mai 2024
  • 3 min de lecture

C’est l’un des projets des Nouvelles routes de la soie. Depuis 2018, la Chine, premier partenaire commercial du Pérou, supervise la construction d’un port de grande ampleur dans le pays andin, à 75 kilomètres au Nord de Lima. Un projet qui a pour objectif de mieux connecter l’Asie et l’Amérique du Sud. Une opportunité économique selon le gouvernement et les autorités locales. Mais sur place, des voix s’élèvent pour critiquer le projet déjà bien avancé.


Des dizaines d’ouvriers, des camions et des grues s’activent sur le sol poussiéreux : ce sont quelque 1 000 hectares de chantier, sur la côte du Pérou , au bord du Pacifique.


Ici, à Chancay, petite ville de pêcheurs, pousse un mégaport. Il sera l'un des plus profonds d’Amérique du Sud.


Les travaux sont supervisés par Gonzalo Rios, directeur général adjoint de l’entreprise étatique chinoise Cosco Shipping. « Ce quai pourra recevoir deux cargos triple E, qui peuvent chacun porter 18 000 conteneurs à charge pleine », nous explique Gonzalo Rios. Au total, 15 quais sont prévus.


Le chargement et le déchargement des conteneurs y seront automatisés. « Cela augmente la sécurité, en minimisant l’intervention humaine », poursuit le chef de chantier. 


A côté du quai, un bâtiment tout neuf, surmonté d’une banderole rouge. On y lit en chinois des « félicitations» pour l’avancée du chantier. 


L’entreprise Cosco Shipping est en effet actionnaire majoritaire du port à 60%... Le reste appartient à une compagnie minière péruvienne.


Objectif de cette construction : gagner dix jours de trajet, en reliant directement l’Amérique du Sud à l’Asie. « Cela vaut pour le Pérou, mais aussi pour d’autres pays de la côte latino-américaine. Egalement pour une partie importante du Brésil, qui est mieux reliée au Pacifique qu’à l’Atlantique.» 


Coût total : 3 milliards 500 mille dollars. Car en plus des quais, il a fallu construire une zone d’embarquement sur les hauteurs de la ville, reliée au port par un tunnel. Sans compter, un parc industriel et un projet de zone franche.


Une promesse d’emplois pour les plus de 63 000 habitants de la région. 


« Le port a une capacité initiale d’environ 1 million de conteneurs annuellement, ce qui va générer des chaînes de valeurs. Par exemple, en lien avec le secteur agricole. Mais aussi permettre l’importation de produits prémontés, qui pourront être assemblés et distribués au Pérou.»   Call Ali.


Inquiétude des pêcheurs


A quelques centaines de mètres, derrière la colline, Juan Cespedes range sa barque à moteur. Il pêche ici depuis seize ans. « Avec le brise-lames qu’ils viennent de construire, on perd du temps ; on doit faire tout un détour pour aller pêcher.. et il faut plus de carburant aussi ! Mais ça les grandes entreprises ne le comprennent pas, elles ont donné de l’argent à quelques pêcheurs comme si c’était suffisant. Mais ça ne marche pas comme ça ! » 


Les pêcheurs s’inquiètent aussi de devoir trouver leur place à côté des futurs cargos. 


Plus loin, sous son parasol, Livia, une habitante, approuve ce mégaport. « Ça me parait bien, il va y avoir plus d’habitants, plus de gens qui viennent nous rendre visite à Chancay. Et aussi ça peut améliorer l’économie », nous confie-t-elle.


Quel impact sur l'environnement ? 


Mais depuis le début des travaux, en 2018, des riverains se plaignent : poussières, explosions régulières, murs fissurés dans les maisons… craintes, aussi, de l’impact environnemental du projet.


Vladimir Cantoral fait partie du collectif pour la défense de Chancay. « De combien va s’améliorer notre indice de développement humain ? et de combien va augmenter notre revenu par tête à Chancay ? Qu’on me le dise. Pour le moment, ni l’Etat ni l’entreprise n'ont répondu à ces questions économiques qui doivent être résolues.»  


D’après lui, la commune n’est pas prête pour un tel projet. Faute d’investissements publics et de planification sérieuse. 


La mairie, elle, assure plancher sur le dossier. « C’est sûr que le temps avance, et on va devoir apprendre à vivre avec la nouveauté, nous assure Giuliana Carrizales Castillo, adjointe au maire. Préparer les gens, avec le soutien du ministère du logement et de la police nationale. Comment allons nous recevoir les gens qui vont venir avec les bateaux ? C’est toute une préparation ! » 


Le port devrait être inauguré dans sept mois en présence du président chinois Xi Jinping. Un lancement scruté de près par les Etats-Unis et l’Europe, préoccupés par l’influence croissante de la Chine en Amérique du Sud. D'autant qu'une autre entreprise chinoise , Jinzhao espère débuter la construction d’un port dans le sud du Pérou (région d’Ica) d’ici 2026, en lien avec des projets miniers.

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